Le Quai des Brumes

Le quai des brumes

Le passé n'est jamais loin

Que cache ce voile?

6h30 du matin.
Les températures trop douces ou trop froides, en alternance, des derniers temps ont fait leurs ravages. La météo est sans dessus dessous.
Neige et pluie verglaçante ne font jamais bon ménage. Les écoles ont été fermées lundi et c'est entre deux flaques de glace noire que circulent avec difficulté automobiles et piétons, même des jours plus tard, aux petites heures du matin.

Ce début de printemps n'échappe pas aux changements climatiques. Il fait juste au-dessus de zéro, en ce matin humide. Trop doux et trop humide, oui. Car un épais brouillard, qu'on voit rarement en ces mois encore froids.

C'est la panique, au port. Toutes les opérations sont en suspend. Les cargos de marchandises occupent toute la place. D'immenses navires de croisière, qui inaugure la saison touristique, mégapoles des mers, sont arrêtés et coincés aux quais. Ils doivent attendre le signal qui leur permettra de lever l'ancre. Les clients rouspètent, certains sont même agressifs. Très agressifs. Plus que le requiert la situation. Ils devraient être dans les îles antillaises vous comprenez? Aux Antilles, sous le soleil! Pas dans ce froid humide et gris! Le ton monte. Les hôtesses et les stewarts peinent L'administration de la Holland American Line s'est finalement résignée à appeler la police, après plusieurs avertissements...

Non loin, les quais et le Waterfront se réveille doucement. Un ou deux cafés ont ouvert plus tôt, pour accueillir la horde de touristes coincés à Halifax, pour concurrencer, tant bien que mal, le Tim Hortons, quelques rues plus haut.
Tant les joggueurs du matin que les rescapés des boîtes de nuit tentent de faire leur chemin entre les plaques traitres de glace qui se cachent dans la brume.

Le brouillard n'effraie pas Maureen. À 67 ans, cette professeure d'histoire retraitée fait son jogging à tous les matins, qu'il vente, qu'il pleuve ou qu'il neige. Elle aime se sentir en forme. Elle aime l'odeur de la mer. Elle aime...

Son élan de course est arrêté. Au-dessus d'elle, un réverbère encore allumé grésille. Il est suivi d'un autre un peu plus loin et d'encore un autre... jusqu'à ce que le premier éclate. Et un deuxième. Et un troisième. Surtension électrique? Les passants s'arrêtent, interloqués et lèvent la tête pour voir ce qui se passe. Maureen s'en éloigne et regarde la longue palissade de bois, en face d'elle. Soudain, elle pousse un cri. Là, dans la brume, une forme immense fonce vers le quai, sur les flots, au travers du brouillard.

Mais que fait ce navire ici?! Que fait l'équipage?!

Explications Hors rp

Que font vos personnages, sur le Waterfront d'Halifax, en cette heure si matinale? Qu'est-ce qui les a poussé à affronter ce brouillard, en ce matin froid de printemps? Comment réagissent-ils, lorsque les réverbères du quai grésillent et éclatent? Et quelle est cet énorme chose qui se dirige vers eux?

Ce sera à vous de déterminer vos actions et vos tours de réponse. Vous pouvez poster autant de fois que vous le désirez, jusqu'à la prochaine intervention du Karma. Essayez de privilégier des réponses courtes et laissez de la place à chacun de vos partenaires de jeu.

On se revoit aux alentours du 15 février pour une autre intervention du Karma.
Stay tune!
Et n'oubliez pas... le passé n'est jamais loin.

@Tristão Guerra @Andy Miller @Dafydd Morgans @Harvey Wolf

quai des Brumes
intrigue

La vie en van ne pouvait aller sans un certain ascétisme. Le sommeil se terminait tôt et après l'avalement d'un maigre petit-déjeuner, se poursuivait sur un jogging qui devait conduire le jeune homme jusqu'à la salle de sport où il finirait son entraînement et prendrait sa douche. Le verglas, la peur de se casser une jambe ou de foncer dans un inconnu ne le dissuadait pas entièrement. Il ferait un trajet plus court, mais il ferait un trajet tout de même. La voix de son ex petite amie continuait de frapper ses tympans. Pas de paresse possible.

Les quais étaient animés, malgré l'heure. Les énormes bateaux bouchaient la vue. Dans leurs fenêtres éclairées, un jeu d'ombre laissait deviner l'agitation des occupants. Tristão ralentit et observa, curieux malgré lui de cette scène qui ne ressemblait à rien qu'il connaissait déjà. Ses yeux étaient rivés sur l'eau, puis sur le ciel losqu'il s'assombrit. Les bras du jeune homme se lèvent pour protéger ses yeux des éclats de verre qui pleuvent. "Porro!" Les jurons lui venaient immanquablement dans sa langue natale. Un instinct se réveilla en lui. Il avait envie de courir, de se transformer et galope jusqu'à ce que son corps le lâche mais ses jambes refusaient d'écouter les ordres. Il était ancré à ce quai, une petite traînée de sang sur son bras, les yeux rivés sur l'eau sans réellement comprendre ce qu'il voyait.

TW : drogues, alcool

Walk of Shame.

Songeur, tu glisses une énième clope entre tes lèvres. Qui a pensé à ce terme? Et pourquoi? Coup d'oeil sur la vitrine d'une boutique fermée. Ton reflet t'apparait, aussi livide que le brouillard qui vous enveloppe tous. Ton joli eyeliner de la veille a dégouliné et les cernes caverneuses te tirent tes traits jusqu'au menton. Tu aurais pu te débarbouiller un peu avant de sortir. Mais... tu n'as pas pu. Il y avait quelque chose, dans le regard de ton hôte. Quelque chose que l'ecstasy de la veille t'avait sans doute voilé. Quelque chose dont tu avais appris à te méfier, dans les rues de Toronto. L'odeur suintante des sacs poubelles dans lesquels tu finirais, si tu perdais un peu trop ton temps sur place. Tu es parti, sans demander ton reste. Sans demander cet argent pour le taxi, que le type t'avait promis, la veille.

La pauvre fille*, au Tim's, en train de fumer devant le portique, avait eu d'autres monstres de la nuit comme toi à gérer. Elle n'avait pas fait de commentaires. Malgré tous tes étages de pulls, ton veston de cuir ne te protège pas de cette humidité vicieuse qui te glace les os. Seul ton gobelet de large double double, torréfication foncée, te réchauffe un peu.

Attroupement sur le quai, tu soupires, veux contourner. Ton lit t'attend. Ces gens ne comprennent-ils pas?
Mais tu t'arrête, ta clope brulante entre les doigts.

Tu t'arrête face à l'énorme chose noire qui s'avance, sur les flots.
Les réverbères éclatent, mais tu ne les vois pas. Il ne font partie que du décor.
Angoisse, déjà-vu. Mais où? Sens-tu la sueur te glacer le dos?

C'est un juron qui te sors de ta transe. Enfin, c'est probablement un juron.
Retour à la réalité. Tu soupirerais de soulagement.

Beau-Gosse, plus loin, a été atteint. Sa présence te dit quelque chose. Tu as déjà vu cet homme. Mais... où? Le rouge, sur son joli bras musclé. Tu jongles entre avec ta cigarette, ton énorme gobelet de café et un paquet de mouchoirs, miraculeusement sorti d'une poche. Tu l'avais oublié.

- Câââlisse, dude. Ça va? Mais c'est quoi ce bordel?

intrigue quai des brumes

- Psiakrew Bogdan, c'est pas l'heure...

Andy maugrée dans sa barbe, la tête soudain fourrée sous l'oreiller. Peine perdue, les pattes de son berger allemand s'abattent sur la couette et un jappement l'appelle irrémédiablement. Le réveil n'a pas encore sonné, mais la demande est sans appel. C'est l'heure de sortir.

- Ca va, ça va, je me lève...

Il pourrait bien râler mais en vérité, la présence de l'animal lui est d'un immense secours. Rythme son quotidien, et lui impose un minimum de routines qui l'empêchent de sombrer trop loin. Le gouffre n'est jamais loin, pourtant. Les cheveux en bataille, l'air clairement pas réveillé, le mécanicien passe en vitesse par la salle de bains, profitant du sommeil de ses colocs pour une douche express, son berger allemand sur les talons. Il ne faut que quelques minutes pour qu'il ressorte habillé à la va-vite, et s'il descend à la cuisine, l'impasse est clairement faite sur quoi que ce soit d'autre que ces foutus cachets qu'il s'astreint à prendre chaque jour, consciencieusement. Pour le chien, c'est le signal, et son impatience est plus évidente encore lorsque le maître s'empare de son blouson et de la laisse qu'il accrochera à son collier un peu plus loin dans le quartier.

Le froid et le temps brumeux ne l'échaudent guère, quoi qu'il prenne le temps d'allumer une cigarette à peine sorti de la petite maison qu'il partage depuis quelques temps maintenant. Une profonde inspiration, et il avance à travers les rues en direction des quais. A cette heure, il espérait y être tranquille mais il semble qu'il ne soit pas le seul être matinal aujourd'hui. S'il n'est pas au fait des derniers aléas climatiques, il ne peut que remarquer l'affluence inhabituelle et son visage soucieux témoigne des interrogations qui germent sous son crâne. Un sifflement rappelle son compagnon à quatre pattes qui revient aussitôt vers lui, et au collier duquel il raccroche la laisse. Trop de monde pour le laisser libre, tant pis. Docile, l'animal reste alors aux pieds de son maître, calquant son pas sur le sien.

Mais le chien s'arrête soudain, couinant étrangement. Comportement étonnant qui stoppe le pas de son maître. Les sourcils se froncent davantage encore, le regard se lève vers ces lampadaires qui se mettent à grésiller bizarrement avant d'éclater. Quelques cris de surprise d'abord, puis d'effroi. Andy suit les visages tournés vers la mer à peine discernable dans le brouillard. L'horizon s'assombrit, bouché par la masse sombre immense qui se dirige droit vers eux.

- Boże święty...

L'éclat ambré tombe au sol, maigre étincelle dans l'obscurité. L'adrénaline s'insuffle dans les veines du pompier volontaire, autant que la terreur. Trop de monde sur ce quai et trop peu de temps devant eux, songe-t-il, quoi qu'il ne soit pas vraiment à même de juger l'avancée du navire et sa capacité à éviter le pire. Sans même qu'il ne s'en rende réellement compte, le voilà qui se met à hurler vociférant à tout va, à tout le monde, de vider les lieux, rentrer dans les terres, s'éloigner au plus vite du désastre qui lui semble s'annoncer.

- Ne restez pas là ! lance-t-il à deux hommes un peu plus loin (@Tristão Guerra @Dafydd Morgans), occultant la blessure pour l'heure minime de l'un d'eux.

Si le colosse des mers entrait sur les terres, ils auraient plus que quelques égratignures à déplorer...

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Avec l'obscurité s'abbatit une lourdeur certaine, et il y avait cette forme venue de la mer qui captait les regards et glacait les corps. Tristão ne sentait pas l'éclat de verre logé dans sa peau, quelques centimètres après son coude ni l'eau qui avait traversé ses chaussures trop fines pour cette météo. Le monde se réduisait à l'ombre menaçante qui grandissait à chaque seconde. Si Tina avait été là, elle lui aurait attrapé le bras et hurlé de courir mais lui, il n'a pas de réflexe de survi aussi développé, il n'a pas eu la même enfance difficile, le même besoin de créer des défenses face au danger. Il a eu une vie trop douce pour ça.

Ce fut la question qui le ramena à lui. Il baissa les yeux sur le mouchoir puis sur sa plaie, semblant enfin comprendre ce qui lui était arrivé. Il le prit d'une main tremblante et vint l'appuyer contre la source du saignement, alors que son regard était déjà de retour sur la forme à la recherche d'une réponse à apporter. Le truc venait vers eux, il n'y avait plus de doute permis. "Viens." Il posa sa main sur le bicep de l'autre homme pour l'attirer avec lui en direction du troisième. inconnu, celui qui était assez malin pour resté éloigné du rivage. "Est-ce que je peux t'en voler un autre ? Et merci, au fait." Les dents serrés, il grattait les bouts de papier imbibé de sang qui collait à sa peau. Des éclats de verre très fins le griffait ici et là. "C'est quoi ça, une... ?" Il grimaçait de ne pas trouver le bon mot en anglais. Son regard passa sur le jeune homme à l'allure fatigué puis sur le type plus vieux, le visage grignoté par sa barbe. Aucun des deux ne semblait capable de lire son esprit pour combler les lacunes de son vocabulaire anglais. "Rah, vous savez, quand il y a trop d'électricité dans les câbles...?" C'était là sa meilleure tentative pour définir la surcharge électrique, mais déjà, il reculait d'un pas et recommençait à admirer la silhouette immense que l'on devinait à travers le brouillard.

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