[libre] red

Sam 13 Jan 2024 - 15:19

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TW : sang, hopital

Sa tête repose sur le mur froid, juste en dessous d'une affiche de prévention blanche et rouge contre les maladies vénériennes. Sybil aurait pu choisir le fauteuil sous celle qui invite les patients à arrêter de fumer, ou encore sous le jaune éclatant de la campagne de vaccination contre la grippe, puisque toutes les places sont libres. Mais elle a choisi les IST, parce que le dessin est le plus moche et qu'elle n'avait pas envie de lui faire face pendant les longues heures d'attente qu'on lui a promis. Hors de la salle, dans le couloir, des pas courent dans un sens puis dans l'autre. Il lui a semblé entendre des roues de brancard couiner et des consignes à propos d'un accident de voiture. C'est là qu'elle a compris qu'elle serait encore là au petit matin, à réclamer des points de suture qu'on lui fera en moins de dix minutes.

Elle baisse les yeux sur sa main ouverte. Les compresses données par l'équipe médicale sont gorgées de sang et la plaie n'en finit pas de cracher son liquide rouge et poisseux. Son corps s'amuse, en ce moment. Elle ne dort pas et sa tête lui joue des tours. Elle vit dans un état proche du somnambulisme. Ce n'est pas étonnant qu'elle ait réussi à se couper la paume au milieu de la nuit, quand la frustration de l'insomnie l'avait guidée jusqu'en cuisine. Elle se serait recouché si son employé, debout pour une raison qu'elle n'avait pas pensé à demander, n'était pas venu lui ordonner d'aller aux urgences comme si elle n'était qu'une adolescente irresponsable. Elle l'avait fait, pourtant, fière de le voir s'affirmer. Elle avait emballé sa main dans un torchon propre, pris deux livres, un taxi et toute sa patience, et elle s'était présenté à l'hopital pour demander des soins. Depuis, elle lisait ces affiches collées au mur et n'allait pas tarder à extirper Margaret Atwood de son sac à dos, en espérant ne pas tâcher les pages.

La porte grince, une nouvelle âme s'invite dans son espace. Sybil lève la tête et lui sourit. "Bonsoir. Je me disais aussi que la solitude ne pouvait pas durer." Elle rigole, pas agacée de devoir partager la pièce. Sa main — l'indemne — désigne les places libres qui l'entourent. "Je vous en prie." Son invitation lui donne des airs de maîtresse des lieux, mais elle préfèrerait ne pas rester sufisamment longtemps pour réclamer ce titre.

La rage est encore là. Fourmillant au fond de son bide, contractant le muscle de sa mâchoire et de ses poings. Pas lourds, grandes foulées, talons claquant sur le bitume. Partir loin d'ici pour ne pas finir le travail. Partir d'ici pour être sur qu'elle n'a rien l'a poussée son amie. Partir pour que la sécurité n'appelle pas les flics. C'est à cause de ces mêmes videurs qui sont pas foutu de faire leur putain boulot que Erin se retrouve dans cette situation. La rage et la douleur se mélangeant dans son corps. Elle a refusé de baisser la tête face à ces abrutis. Mais n'a rien dit quand ses amies ont préféré quitter la boite de nuit dans laquelle elles se trouvaient. Rage déjà qu'on lui pourrisse ainsi sa soirée. Surtout à cause de pseudo mâles alphas qui ont besoin de se prouver quelque chose en venant avec leur gros sabots draguer et refusant d'entendre un non. N.O.N. Cela ne devrait pas être si compliqué que ça à comprendre? Ils ont dû être bercer trop près du mur ceux là car ils n'ont pas lâché l'affaire. Ni quand Erin a commencé à gentiment d'aller voir ailleurs, ni quand le groupe de fille ont quitté la boite. Enfin deux d'entre eux. Les autres ont peut être jeté leur dévolu sur quelqu'un d'autre.. Ou continué à alourdir leur haleine par l'alcool.

Dehors le ton est monté. Petit bout de femme qui ne voulait pas qu'ils les suivent. Une main s'est posée sur elle. Reflexe d'une autre vie qui s'est enclenché. Voix qui résonne au creux de son oreille. Agir vite. Ne pas laisser le temps. Retourner tous ce que tu peux contre lui Alors corps qui pivote, tord violement le poignet. Cri de douleur dans la rue, lumière artificielle qui déforme les ombres, les visages. Contentement bien trop grand sur le sien. Douleur sur l'autre. Et rage sur celui qui se porte vers elle. Lui aussi n'hésite pas. Claque qui lui chavirer le visage, insulte qui cingle le calme relatif. Mur qui vient trop vite à sa rencontre, comme l'autre qui continue à crier sa rage d'homme bafoué. Mais déjà Erin chasse ses talons. Enlever ce qui la gêne. Répliquer. Vite. C'est brouillon. Cela pourrait être plus efficace si la brune avait continué à pratiquer le corps à corps. Mais cela semble suffire pour une homme ayant une grosse quantité d'alcool dans le sang. C'est quand son amie vaporise un coup de bombe à poivre dans la gueule de son assaillant et la tire en arrière que la tatouée reprend pied avec la réalité. Faut se barrer car l'autre couard est allé chercher les vigiles. Pas envie de passer la soirée au poste. Alors les talons sont enfilés de nouveau et elles se barrent à son tour.

A l'hopital à cause d'un accident de la route on a pas le temps de s'occuper d'elle. Pas tous de suite. Après tous elle n'a rien de grave non? Rapide vérification quand même avant de l'envoyer dans la salle d'attente. Phalanges contusionnées, bleu qui se forme déjà sur une pommette, lèvre fendue, douleurs aux côtes et à la tête.. Ces dernières choses seront à revoir, quand cela se sera calmé. Quelques instants pendant qu'Erin persuade ses amies de quitter les lieux. Pas envie de les mettre dans les emmerdes si on pose trop de questions.. Pas envie qu'elles lui posent trop de questions de comment elle a pu faire ça. Envie d'être seule pour se calmer et panser ses plaies pour ne pas être désagréable. Porte poussée. Salle un peu lugubre de son point de vu, affiches bigarrées aux multiples thèmes. Pas tous joyeux. Et une femme. A la chevelure rousse bien familière. Main qui se lève dans un simulacre de salut, doigts bougeant vaguement. Je n'aurai pas pensé te croiser là Yeux qui avisent la main enveloppée dans des compresses. Ca va aller? Rien de grave? Question con car sinon Sybille ne serait pas en salle d'attente mais là bas d'où Erin vient mais bon.. La douleur devenant de plus en plus forte n'aide pas.. Ni les verres qu'elle s'est enfilé. Corps qui se plie avec précaution pour s'assoir pas trop loin de la femme. Long soupir, simulacre de remise en place de sa combi', chaussures chassées de nouveau d'un coup de talon. Ca fait longtemps que tu es ici?

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